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mauvaise destinée. Quand rien ne soutient, il est bien facile de tomber. Le cabaret est là, seul plaisir offert au pauvre, qui, lui aussi, veut du plaisir. Mais celui-ci, au lieu de rafraichir et d’élever l’être, le dégrade ; au lieu de combattre les mauvaises influences de la misère, l’aggrave, la rend bientôt absolue, et tue par le père toute la famille, soit de corps, soit d’âme. Je n’étais pas exempte de craintes pour ma jeune sœur, dont le mari déjà se dérangeait. Donc, j’avais souvent des heures de grande tristesse ; mais, en même temps, dans ma solitude et dans le repos relatif dont je jouissais, il me prenait aussi des rêveries toutes nouvelles.

« C’était, après l’hiver de tant d’épreuves, comme un printemps qui poussait en moi ; je sentais dans mon cœur toute une nichée de désirs qui battaient de l’aile et voulaient prendre l’essor ; mais où ? de quel côté ? je n’en savais rien. Les plaisirs des autres ne me tentaient pas. Deux ouvrières, qui logeaient près de moi, m’avaient une fois en-