m’avaient quittée ; nous avions un compte chez le boulanger, un autre chez l’épicier ; je devais pour ma sœur deux mois et demi d’apprentissage, — et comment combler tout cet arriéré, quand mon travail ne suffisait pas encore aux besoins journaliers ? J’avais toujours sous les yeux cette grosse dette ; c’était comme une montagne qui m’ôtait le jour, et J’en avais le poids sur le cœur. Je demandai du secours à mon frère, qui gagnait maintenant sa journée ; mais il me refusa, disant qu’il n’avait pas trop pour lui, et je vis avec chagrin que mon père le débauchait et qu’ils allaient boire ensemble.
« C’est ainsi qu’ils se perdent les uns par les autres, faute d’un peu d’instruction qui leur élèverait l’esprit et leur ferait chercher de meilleurs plaisirs. Mon frère continua de m’apporter ses hardes à raccommoder, et je n’avais pas le courage de le refuser, bien que je fusse indignée. C’est de leur force que les hommes parlent toujours pour se mettre au-dessus des femmes, et en même