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et je m’ennuyais un peu. Je n’avais dans la tête que des imaginations bien drôles, je vous jure ; car on ne m’avait donné le vrai mot de rien, et les choses s’arrangeaient dans mon esprit n’importe comment, la plupart au rebours de ce qu’elles sont. J’ai entendu parler de ces animaux étranges que les anciens hommes, ne sachant pas l’histoire naturelle, avaient bâtis à leur manière, mettant la tête d’une espèce sur le corps d’une autre. C’était dans mon idée un peu comme cela, et jusqu’à près de vingt ans j’étais si sotte, qu’on pouvait me faire croire tout ce qu’on voulait.

« Ma mère, qui était blanchisseuse, allait en journée. Nous ne la voyions que le soir, et c’était ma sœur ainée qui gardait les deux plus petits, tandis que mon frère et moi nous restions chargés de nous-mêmes. On m’envoya cependant à l’école communale pendant un an ; j’appris à lire et je commençais à tracer mes lettres quand, ma sœur aînée ayant atteint ses douze ans, on l’envoya tra-