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force et elle portait des coups plus rudes qu’aucune épée1. — Le dragon recommença l’attaque pour la troisième fois ; il se jeta au moment propice sur Beowulf et entoura complètement le cou du héros de ses dents acérées ; la bête fut couverte par le sang qui s’échappait à flots de la blessure.

XXXVII

Wiglaf, à ce qu’on m’a rapporté1, fit preuve selon son habitude d’héroïsme et de constance dans la nécessité du roi ; il ne protégea pas sa tête et sa main fut brûlée au moment où il frappait l’ennemi (son épée s’enfonça dans le dragon et après ce coup le feu commença à se ralentir). Le roi, qui avait repris ses sens, leva encore le couteau affilé qu’il portait sur sa cuirasse et fendit le dragon par le milieu. Le dragon mourut sous les coups des deux parents ; — tout le monde devrait suivre l’exemple de Wiglaf et secourir ainsi ses proches dans le besoin.

Ce fut la dernière guerre à laquelle prit part Beowulf. La blessure que le dragon lui avait faite commença à enfler et à le brûler. Il s’aperçut bientôt que le poison agitait son sein. Il alla s’asseoir alors près du mur ; il regarda l’œuvre des géants et vit comment les arches de pierre et les colonnes sur lesquelles elles reposaient soutenaient l’intérieur de la caverne. Wiglaf rafraîchit ensuite avec un peu d’eau son roi sanglant et fatigué et détacha son armure. Beowulf, qui voyait approcher la fin de sa vie, parla en ces termes :

« Si j’avais un fils je lui donnerais mes vêtements de combat. J’ai gouverné ce peuple pendant cinquante hivers ; aucun des rois voisins n’a osé m’attaquer pendant mon règne. J’ai passé sur le trône le temps que le destin a voulu ; j’ai bien gardé ce que je possédais ; je n’ai pas tendu d’embûches et je n’ai pas fait de faux serments. Je dois donc, malgré mes souffrances, me réjouir de ce que Dieu ne pourra m’accuser après ma mort d’avoir été le meur-