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frappa de son épée, mais la lame glissa sur l’os et pénétra moins loin qu’elle n’aurait dû le faire. Après ce coup le dragon entra dans une grande colère ; il se mit à vomir des flammes qui s’étendirent au loin. Beowulf ne s’enorgueillissait pas d’une brillante victoire ; son épée lui avait refusé le service dans le combat, contrairement à ce qu’elle aurait dû faire. Le fils d’Ecgtheow allait subir la loi commune et mourir. Les combattants ne tardèrent pas à être de nouveau aux prises. Le dragon prenait de l’assurance ; un souffle brûlant sortait de sa poitrine et Beowulf était de nouveau à l’étroit dans un cercle de feu. Ses compagnons ne se pressèrent nullement autour de lui, mais ils s’enfuirent et allèrent mettre leur vie à l’abri dans un bois. Cependant le cœur de l’un d’entre eux était rempli de soucis (l’homme d’honneur n’oublie jamais ses parents).

XXXVI

Wiglaf, fils de Weohstan, vit que la flamme étouffait son roi. Il se souvint alors de la bienveillance de Beowulf qui lui avait donné autrefois la riche demeure des Wægmundingas et tous les privilèges possédés par son père ; il ne put résister, mais il prit son bouclier, et tira son épée de son fourreau (c’était l’épée d’Eanmund, fils d’Ohthere ; la vengeance de Weohstan lui fut fatale et les armes qu’il tenait de son parent Onela tombèrent en la possession du vainqueur ; Weohstan ne parlait guère de ce combat dans lequel il avait tué le neveu d’Onela. Il conserva l’épée et la cotte de mailles du défunt pendant de longues années jusqu’au temps où son fils fut en âge d’affronter les combats ; il lui donna alors un nombre immense de vêtements de guerre puis il mourut chargé d’années). C’était la première fois que le jeune guerrier allait conduire l’attaque avec son roi, mais son esprit n’éprouva pas de faiblesse et son épée ne lui refusa point le service dans la mêlée : c’est ce que le dragon vit dès qu’il arriva en sa présence. Wiglaf, dont l’âme était remplie de tristesse, tint à ses compagnons ce noble discours :