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qui n’aura aucun espoir de voir finir ses maux ! Heureux, au contraire, celui qui peut chercher après sa mort un refuge dans les bras de Dieu.

IV

C’est ainsi que l’affliction déchirait le fils de Healfdene, car il ne pouvait détourner les maux que lui causaient son ennemi : cette guerre, ce mal nocturne fait au peuple, était trop terrible et trop long !

Le bruit des crimes de Grendel parvint jusqu’au chevalier de Hygelac1 qui était vaillant parmi les Goths et l’homme le plus fort de son temps. Il ordonna d’équiper un navire et dit qu’il irait trouver par mer Hrothgar, puisque ce roi avait besoin de monde. Les hommes sagaces ne blâmèrent point ce voyage bien que le chevalier leur fût cher : ils encouragèrent ce brave2 et ils tirèrent des augures favorables sur son entreprise. Beowulf3 avait choisi, parmi les Goths, les guerriers les plus hardis qu’il avait pu trouver. Ils s’embarquèrent à quinze dans le navire. Un homme, expert dans la navigation, les conduisit à la limite des terres. Le temps était passé ; le bateau était sur les flots, remisé sous la falaise. Les guerriers étaient prêts ; ils montèrent sur la proue. Les courants faisaient tordre la mer contre le rivage. Les guerriers portèrent au milieu du navire des équipements magnifiques, puis, commençant leur expédition volontaire, poussèrent leur navire au large. Poussé par un bon vent le navire fendit comme un oiseau les flots de la mer, en sorte que, vers la même heure du jour suivant, il arriva à un endroit d’où les navigateurs aperçurent la terre et virent briller les falaises, les rochers escarpés et les vastes promontoires marins : la mer était traversée4 et le voyage à sa fin. Les Wederas montèrent aussitôt sur le rivage et attachèrent leur navire (on entendit le cliquetis des cuirasses) ; ils rendirent leurs actions de grâce à Dieu5 de ce qu’ils avaient pu accomplir facilement leur voyage.