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COMBATS DE COQS.

mâchoire est une arme puissante ; leur peau, si dure que les dents acérées n’y pénètrent que difficilement, est une excellente cuirasse. La lutte peut être longue, et, s’ils sont de force égale, la mort seule y met un terme.

Max attrapait aussi à la glu des moissons, petits oiseaux rageurs au bec vigoureux, qui ressemblent beaucoup à nos pierrots d’Europe. Quand il en tenait un, il lui taillait une crête dans un morceau de drap rouge, et puis lâchait la pauvre bête, qui, toute joyeuse, retournait auprès des siens ; mais alors commençait une furieuse bataille. Les autres frères-noirs, comme les nomment les nègres, ne reconnaissant plus leur semblable dans cet oiseau pourvu d’une crête à la façon d’un coq, tombaient sur lui et le chassaient de la compagnie, non sans avoir perdu eux-mêmes plus d’une plume, car le proscrit protestait énergiquement contre l’ostracisme qui le frappait.

Ces menues férocités, qu’elle ne pouvait empêcher, inspiraient à Yette une sorte d’horreur ; elle ne savait comment l’exprimer à Maxime ; mais sans cesse elle lui répétait :

« Méchant ! si tu étais à la place du père-noir ou du pauvre anoli ! »

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