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JOURNAL DE CORA.

moire des choses récentes, et pourtant la bonne femme m’a parlé de ma sœur Yette, qui lui donnait des sous pour acheter du tabac.

6 octobre.

M. le curé nous a, l’autre soir, appris un trait de dévouement pieux qui a touché papa et que nous voulons récompenser.

Il y a près d’ici un jeune nègre africain nommé Mavongo, qui travaille sur les habitations sucrières des environs et ici même assez souvent. Ce Mavongo trouve encore le temps de servir d’esclave, plutôt que de domestique, à une vieille négresse qui n’a sur lui d’autres droits que ceux d’une marraine. Il est vrai que ces droits sont les plus sacrés aux yeux des Africains ; ils ne trouvent pas apparemment que ce soit trop de donner sa vie aux gens à qui ils doivent le bienfait de la religion. Mavongo travaille au jardin de la négresse, vend le lait de ses vaches, soigne ces dernières et verse religieusement entre les mains de Marraine, chaque samedi soir, le salaire de la semaine. Papa m’autorise à donner toutes mes petites économies au bon Mavongo, pour se faire