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L’HABITATION DU MACOUBA.

cases nègres formaient sur la propriété. Elle y laissait de bon cœur les gros sous de sa bourse ; mais force était bien, quand elle avait rempli ces devoirs agréables, de lui mettre la bride sur le cou. L’impatiente meute des négrillons, qui n’a d’autre souci que d’inventer sans cesse tous les jeux, toutes les farces, toutes les espiègleries possibles, guettait au passage la petite maîtresse. Sous prétexte de la surveiller, de remplacer la da, c’était à qui l’entraînerait dans les plus périlleuses aventures.

Combien de fois la crut-on perdue, tombée dans quelque précipice ! On ne cultive jamais plus de la moitié de ces grandes propriétés créoles ; l’autre moitié est composée de casse-cou dangereux, même pour les animaux. De quel côté son étourderie pouvait-elle avoir emporté Yette ? La pauvre da éplorée courait tout le jour à sa recherche, comme une poule après le caneton qu’elle a couvé. Yette revenait souvent avec des bêtes rouges aux jambes, souffrant le martyre des piqûres de ce petit insecte, et alors la da, sans plainte ni réprimande, la lavait avec des décoctions d’oranger, de bourgeons de vigne et d’herbes odoriférantes ; d’autres fois, les jours de forte pluie, Yette se lançait pieds nus du côté de la rivière,

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