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YETTE CHEZ ELLE.

beaux appointements qui s’accumuleront peu à peu pour te former une dot, et tu resteras auprès de Mme Darcey qui offre de te traiter comme sa fille. C’est ce que tu désires, si je ne me trompe ? »

Cora était devenue pâle. Elle se dégagea des bras qui l’entouraient et, debout, d’un ton de reproche amer :

« Tu me quitterais ? dit-elle.

— Quant à cela, il le faudrait bien. M. de Clairfeu est nommé ambassadeur en Russie. Je suivrai sa famille. Ce sera l’affaire de quelques années…

— Yette ! s’écria Cora avec un accent de détresse.

— Eh bien ?…

— Tu détestais tant l’idée d’être institutrice dans une famille étrangère !

— Oui, j’avais des préventions… des préventions que maintenant je trouve absurdes. Mme Darcey m’a toujours dit, tu le sais, que ce serait pour moi, pour nous deux, le meilleur parti à prendre. D’ailleurs, je serai très bien chez les Clairfeu… ils auront toutes sortes d’égards… »

Yette parlait d’une voix brève et précipitamment, en détournant un peu la tête, afin de ne pas laisser voir à sa sœur les larmes qui s’amoncelaient