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YETTE CHEZ ELLE.

— Oh ! je ne regrette pas la pension, reprenait vivement Cora. Pourtant, sais-tu bien que les pommes de terre figurent dans tes menus plus souvent encore que dans ceux du réfectoire ?

— C’est une excellente nourriture.

— Oui, de temps en temps… J’aurais peut-être meilleur appétit si je me promenais davantage ; mais nous ne pouvons sortir que dans l’intervalle de tes leçons, c’est tout naturel… Ma bonne Yette, reprenait Cora après un silence, il nous faudrait un tapis de Perse, comme chez les Darcey.

— Un tapis de Perse, y songes-tu ? Cela coute très cher.

— Vraiment ? Je ne savais pas ; c’est si joli ! Quel dommage que toutes les jolies choses soient chères ! »

Ces exigences étaient de la part de Cora pur enfantillage ; le luxe qu’elle admirait chez les Darcey l’avait un peu gâtée. Sans l’envier, — car elle était incapable d’un sentiment bas, — elle eût voulu essayer de l’imiter, et surtout peut-être avoir des toilettes, aller dans le monde comme Mlle Polymnie.

Rien n’est plus malsain quand on est pauvre, qu’on a l’âme faible, et à l’âge surtout où l’on

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