Page:Bentzon - Yette, histoire d'une jeune créole, 1880.djvu/205

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

169
TENTATIVE D’ÉVASION.

En même temps il tournait l’angle de la rue pour sonner sans doute à la porte du pensionnat.

« Je suis perdue, pensa Yette ; si je sautais ?… »

Mais considérant l’espace, elle sentit sa tête tourner comme les ailes d’un moulin et dut fermer les yeux. D’ailleurs, Mlle Agnès était arrivée au bas du mur.

« Est-ce possible ? criait-elle, malheureuse enfant ! Descendez vite ! Vous allez vous tuer ! Au secours ! Au secours ! »

On accourut. Le sergent de ville avait de son côté donné l’alarme. L’échelle fut de nouveau dressée contre la muraille, et, bien que Yette essayât d’abord de courir sur la crête étroite avec une agilité qui fit jeter les hauts cris à la nerveuse Mlle Agnès, puis de griffer et de mordre comme un chat-tigre aux abois, on réussit à s’emparer d’elle. Au milieu d’un groupe imposant qui la gardait à vue, elle fut conduite droit au cabinet de Mlle Aubry. Celle-ci, avertie déjà du délit, se tenait assise sur son fauteuil avec la majesté d’un juge. Du geste elle congédia tout le monde, puis elle regarda la coupable d’une façon que celle-ci ne s’expliqua pas bien, en pinçant les lèvres et frisant la paupière. On eût dit

22