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HISTOIRE D’UNE JEUNE CRÉOLE.

Elle sortit sans attendre la réponse de la sous-maîtresse, qui déjà était dans le cabinet. Lorsque cette nouvelle figure lui enjoignit de la suivre, Yette pensa que l’heure fatale était venue. Elle marcha néanmoins la tête haute, avec une force d’âme dont elle était intérieurement fière, vers l’inévitable expiation.

Mlle Agnès lui fit traverser le parloir, puis une autre chambre, puis une sorte de galerie bordée des deux côtés de petits lits blancs abrités par des rideaux. Le silence était profond ; à peine les respirations réunies d’une trentaine de petites filles formaient-elles un léger murmure. Un demi-jour, produit par des lampes de nuit, régnait dans cette salle consacrée au sommeil.

Mlle Agnès montra un des lits à Yette.

« Couchez-vous, » dit-elle.

Et, la voyant fort embarrassée, elle l’aida obligeamment à se déshabiller. Cinq minutes après, Yette, les yeux fermés, pour pouvoir se figurer qu’elle n’était pas dans un lit de pension, remerciait le bon Dieu de l’avoir préservée de la bastonnade qu’elle jugeait avoir méritée.

Elle ne rouvrit les yeux, longtemps après, que pour les refermer bien vite, et même pour se cacher la tête sous les couvertures. Était-ce un cau-