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LE PENSIONNAT.

ceaux de verre se détachant jonchèrent la cheminée, où leur chute occasionna encore quelques menus dégâts.

Mlle Aubry, qui s’était crue d’abord menacée elle-même, fut presque rassurée lorsqu’elle entendit éclater la glace, mais ce soulagement ne dura pas. Il fit place à la plus complète indignation, nous dirions à la colère, si une personne aussi maîtresse d’elle-même eut été susceptible d’un sentiment qui ne fût pas correct et mesuré. Son sourcil se fronça, ses lèvres se pincèrent, elle saisit à bras-le-corps Yette abasourdie par le méfait qu’elle venait de commettre, puis, ouvrant la porte d’un cabinet absolument vide, celui-là, et qu’éclairait une seule fenêtre grillée, l’enferma à double tour avec ces simples mots : « Ici du moins, mademoiselle, vous ne pourrez rien casser, que votre tête contre les murs si vous le jugez bon. Libre à vous, elle vous appartient. »

Il est rare que la honte et le saisissement d’avoir brisé quelque chose ne mette pas fin à l’accès de fureur le plus terrible. La solitude acheva de rafraîchir le sang de Yette. Un certain intervalle s’écoula pendant lequel il lui fut loisible de réfléchir. Les dernières paroles de Mlle Aubry