Page:Bentzon - Yette, histoire d'une jeune créole, 1880.djvu/135

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

107
PREMIER ACCUEIL.

est en retard de plus d’une demi-heure. C’est vous mademoiselle de Lorme ? Parbleu ! tout le portrait de mon ami Georges. Vous faites bien de lui ressembler ! Dix colis !… Et pour quoi faire, bon Dieu ! En pension, vous n’aurez pas besoin de tant de nippes ! La robe de mérinos noir, voilà tout ! Ces créoles sont tous les mêmes. Donnez-moi votre billet de bagage ; au lieu d’attendre, j’enverrai chercher tout cela. J’ai déjà perdu trop de temps. Venez ! »

M. Darcey ne fut nullement sympathique à Yette tout d’abord ; elle se demanda, étonnée, pourquoi son papa l’aimait tant. Peut-être, quand M. de Lorme l’avait connu, n’ avait-il pas encore cette physionomie soucieuse d’un homme que les affaires absorbent tout entier. Il s’acquittait en conscience de la corvée qui lui incombait, mais eût évidemment préféré n’être point dérangé.

M. Darcey fit monter Yette et sa da, qui, ni l’une ni l’autre, n’avaient osé articuler un mot, dans son coupé, jeta un ordre au cocher et, quant à lui, s’en alla vite à la Bourse. La voiture s’arrêta sous la porte cochère d’une belle maison de la Chaussée-d’Antin, et un domestique, qui paraissait faire le guet, pria Mlle de Lorme, comme si elle eût été une grande personne, de vouloir