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FORT-DE-FRANCE.

hardi jeté sur sa rivière, près de l’embouchure.

Un navire venant de France avait été signalé ; la mer était couverte d’une multitude de petites voiles qui se précipitaient à sa rencontre : c’étaient des pirogues, longues de vingt pieds sur trois de large, creusées dans un tronc d’arbre et garnies de chaque côté d’un léger bordage de six pouces de haut. Un nègre placé à l’arrière gouvernait au moyen d’une pagaie ; deux autres nègres, pendus à l’écoute de la voile, un pied sur le rebord du canot et le corps penché du côté du vent, faisaient contrepoids ; selon que la brise fraîchissait ou semblait mollir, ils se couchaient littéralement sur la mer, ou se redressaient un peu afin de maintenir dans son aplomb la pirogue, dont l’énorme voilure offrait au vent une prise considérable.

Des luttes s’engageaient entre les pirogues ; l’une d’elles vint à chavirer ; aussitôt les trois nègres de nager autour de leur esquif, de le démâter, de le relever, d’en faire sortir l’eau en lui imprimant un balancement régulier, le tout avec aisance. En moins de cinq minutes ils avaient remis à la voile, et de plus belle fendaient l’onde.

Le débarquement des passagers du bateau à