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tives, aussi est-elle le refuge naturel de ceux qui ne peuvent aimer, croire, espérer ni agir. L’alcool ne grise et n’étourdit pas mieux ; aucun plaisir n’étouffe aussi victorieusement toutes les sensations qui ne se rapportent point à lui. Quelque nom qu’on lui donne : fièvre, ivresse, ruine, cet ennemi bienfaisant m’a souvent ouvert un dernier refuge, lorsque le reste m’abandonnait. Cette fois, cependant, la vertu de ses philtres échoua. J’avais beau passer des nuits accoudé au tapis vert, la perte me laissait aussi indifférent que le gain. Tandis que le sort se prononçait pour ou contre moi, je cherchais parmi la foule un visage ami, et quand j’avais découvert telle mèche de cheveux noirs ondée d’une certaine façon, tel profil indécis encore velouté du duvet de l’adolescence, tel petit signe posé comme une