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cience, comme l’avait fait son corps, — sauf, toutefois, pour ce qui était du sens de l’ouïe, qui avait conservé une acuité singulière ; mais elle gardait assez de mémoire pour se rendre pleinement compte qu’un tel monde existait, qu’il y avait, dans ce monde, d’autres personnes, et que ces personnes allaient à leurs occupations, ne sachant rien de ce qui venait d’arriver. L’esprit de Mabel continuait à se rendre compte de tout cela : seuls, les visages, les noms, les détails des lieux avaient disparu. En fait, elle avait une conscience de soi différente de celle qu’elle avait eue auparavant, toute différente : mais, certes, non moins nette et non moins profonde. Il lui semblait qu’elle venait, enfin, de pénétrer dans le fond de son être, qui, jusqu’alors, ne lui était apparu que comme du dehors, à travers des portes de verre opaque. Et cela lui semblait très nouveau, mais, aussi, très familier : elle avait l’impression d’être parvenue à un centre, dont elle avait parcouru la circonférence durant toute sa vie.

Au même instant, elle découvrit et comprit que son sens de l’ouïe, à son tour, venait de mourir.

Et puis, une chose surprenante arriva : mais il lui sembla que toujours elle avait su que cette chose arriverait, bien que jamais son esprit n’en eût articulé et défini l’idée. Et, ce qui arriva, ce fut ceci :

Les barrières qui entouraient son âme tombèrent, avec un grand fracas, et elle se sentit en-