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lait, approuvait ou condamnait ce qu’elle entendait. L’image la plus satisfaisante qui, par la suite, résumât pour elle son impression durant ce discours était celle-ci : que pendant que l’orateur parlait, c’était elle-même, Mabel, qui parlait. Ses propres pensées, ses sentiments divers, ses souffrances, sa déception, ses espoirs nouveaux : tous ces modes intérieurs de son âme, dont à peine elle se rendait compte, voici maintenant que cet homme les reprenait, et jusqu’au flux et reflux le plus changeant de ses idées ! Et voici qu’il proclamait tout cela au monde, après l’avoir purifié et rehaussé merveilleusement ! Pour la première fois de sa vie, elle comprenait pleinement ce que signifiait la nature humaine : car c’était son Propre cœur qui flottait dans l’air de l’Abbaye, porté par cette voix immense. Home avait péri ; en Angleterre, en Allemagne, en Italie, des rues s’étaient remplies de sang, et cela parce que l’Homme, pour un instant, était retombé jusqu’au niveau de la nature du tigre. « Oui, ce que l’on n’aurait pu croire s’est produit, criait la grande voix ; et, pendant plusieurs générations, l’Homme aura désormais à rougir de honte en se souvenant que, un jour, il a tourné le dos à la lumière clairement apparue ! »

Il n’y avait point, dans ce discours, d’appels au pathétique, pas de peintures de palais écroulés, d’hommes s’enfuyant, de l’œuvre terrible des explosifs. L’orateur ne voulait voir que les scènes, plus horribles encore, qui avaient eu