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soixante générations de chrétiens… Mais on devait se garder de désespérer : la foi dans l’homme était l’essence de la religion, la foi dans les éléments les meilleurs de l’homme, dans ce que celui-ci était destiné à devenir, non pas dans ce qu’il était à présent. On se trouvait au début de la religion nouvelle, et non pas encore à sa maturité ; et il était naturel qu’on découvrit de l’aigreur dans le jeune fruit… Et puis, il fallait songer aussi à la provocation ! Il fallait se rappeler le crime monstrueux que ces catholiques avaient projeté, la façon dont ils avaient résolu de frapper au cœur la foi nouvelle !

— Ma chérie, disait-il, un homme ne change pas en un instant ; et puis, pense un peu à ce qui serait arrivé si ces chrétiens avaient réussi !… Je t’assure que je condamne tout cela aussi sévèrement que toi ! J’ai vu, ce soir, deux ou trois journaux qui sont aussi méchants et ignobles que tout ce que les chrétiens ont jamais pu faire. Ces journaux exultent à l’idée des horreurs commises, sans se douter que cela risque de faire reculer le mouvement, de nous ramener de vingt ans en arrière !… T’imagines-tu donc que tu sois seule de ton avis, et qu’il n’y ait pas des milliers d’autres cœurs qui haïssent et détestent ces violences ?… Mais à quoi bon avoir la foi, si ce n’est point pour être assuré que la bonté prévaudra ? La foi, la patience, l’espoir, voilà les armes par lesquelles nous vaincrons !

Il parlait avec une conviction passionnée, les