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TRAGEDIE.

Polixene.

Quelle grace au coupable enfin puis-je donner
Puis que c’eſt le punir que de luy pardonner ?
Pourquoy deſirez-vous que cette main vous tuë ?
Quoy depuis la faveur que de vous j’ay receuë,
Depuis qu’à ma priere on vous a veu changer,
M’avez-vous obligée à vous deſobliger ?

Achille.

Si vous m’eſtiez bon juge en cognoiſſant mon crime,
Vous le feriez paſſer pour acte legitime.
Mais vous eſtes ſevere, & je ſuis criminel
À cauſe que je ſçay que vous me croirez tel.
Ouy je vous faſchay moins meurtriſſant voſtre frere,
Je ne fus que hardy, mais je ſuis temeraire.
Tous mes faits ne ſont rien, je m’eſleve au deſſus,
J’ai beaucoup fait, Madame, & j’oſe encore plus,
Mon audace merite une cheute pompeuſe,
Et cette vanité rend ma honte fameuſe.
Qu’elle periſſe donc ſans me faire parler,
Que l’ambition creve à force de s’enfler :
Je peche contre vous ſans remords, & ſans blaſme.

Polixene.

Mais quel eſt ce peché ?