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De Bensseradde.

Je n’euſse rien gagné, s’il n’euſt eſté hay,
Je ſuis victorieux, parce qu’il eſt trahy,
La lâcheté, le vice a fait que je diſpoſe
390D’un fruict de ma valeur, et du droit de ma cauſe,
L’on ne me vid jamais depuis que j’ay veſcu
Devoir une victoire au malheur du vaincu,
J’ai regret dans la peine où nous le voyons vivre
De voir des ſerviteurs le quitter pour me ſuivre,
395J’acuſe malgré moy leur deffaut d’amitié,
Pres d’eux, il m’eſt ſuſpect, ſans eux, j’en ay pitié,
Dans ſa condition je plains le ſort des mâitres,
Ceux qu’il a fait ingrats, ma vertu les fait trâitres.

Agrippe.

„ Ce n’eſt point reſſentir un courage abattu
400„ De trahir le peché pour ſuivre la vertu :
Devant qu’une molleſſe eut fait leur mâitre infame,
Quand il aimoit la gloire, et non pas une femme,
Lors qu’Antoine piqué d’un déſir généreux
Faiſoit le Capitaine, & non pas l’amoureux,
405Sa vaillance eut rendu leur fuitte illegitime,
Le trahir en ce temps c’eut eſté faire un crime :
Mais depuis qu’oubliant ſes generoſitez
Ce grand cœur s’eſt perdu dedans les voluptez,

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