Page:Benjamin - Le Major Pipe et son père, 1918.djvu/248

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
248
LE MAJOR PIPE ET SON PÈRE

de la machinerie moderne et dans l’air toute la fatigue qui monte de ce travail mécanique ininterrompu et épuisant ; mais sous les feuillages et les drapeaux, il y avait aussi un étonnant entrain, et l’on sentait de la gaîté au travail dans ces cervelles de travailleuses.

D’ailleurs, elles étaient toutes surprenantes de propreté, de jeunesse et de charme. Leur seule tenue était un indice qu’elles s’installaient, chaque matin, avec l’ardeur qu’on met aux choses nouvelles ; pour la millième fois elles recommençaient, en ayant l’air de commencer. Elles portaient une blouse propre, et surtout un bonnet, — oh ! si drôle : un bonnet à faire des chansons dessus, — bonnet de baigneuse, bouffant ou serré, qui d’abord semble le même pour toutes, mais que chaque main de femme sait vite faire sien, en l’inclinant, en l’ajustant aux tempes, en enfermant le chignon, tandis qu’un bout d’oreille passe, ou que trois cheveux s’ébouriffent ; coiffure faite de rien, mais qui convient à toutes, coiffure nationale, bonnet du pays travaillant pour la guerre, et qui selon qu’on le pose sur des cheveux blonds ou noirs exprime le même idéal, à la manière claire ou a la manière forte.

— Elles sont charmantes, dit Barbet avec une