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LE MAJOR PIPE ET SON PÈRE

Les chantiers de la marine anglaise ! Quoique Anglais, il ne les connaissait pas, et cette simple annonce suffisait à l’émerveiller, lui qui avait toujours été amoureux de tous les bateaux.

— Même à vapeur ? lui dit Barbet.

— Oh ! le vapeur est dedans, mais l’Océan est dehors, avec aventures et frayeurs, et tant de grandes choses qui émouvantent les gens de la terre.

Un jeune officier de marine, aux yeux vert pâle, comme devaient en avoir les plus beaux dieux de la mer, vint les attendre au train et leur fit traverser la ville en auto. Il était doux, timide, et comme M. John Pipe lui disait d’avance sa joie, il rougit très fort.

Les fameux chantiers sont loin de la gare. On parcourt d’abord plusieurs kilomètres dans une ville médiocre et dans de mornes faubourgs. Et M. John Pipe ayant vu des maisons misérables et de pauvres enfants chétifs répandus par les rues, il commençait de s’inquiéter, mais on atteignit les chantiers promis, et là, transporté par l’œuvre, il oublia les ouvriers.

La poésie de M. John Pipe, pour la première fois, tua sa tendresse. D’abord, des chantiers au grand air ! Et puis, un spectacle si prenant, si