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LE MAJOR PIPE ET SON PÈRE

immobile, les Anglais parce qu’ils étaient en train de lire des magazines, les autres parce qu’ils guettaient avidement.

Puis, les mouettes se calmèrent et se mirent à pêcher. Et Barbet, qui respirait mieux, mais dont les idées étaient peut-être encore obscurcies de quelque inquiétude, commença un dialogue bizarre avec l’Italien qui mangeait ses choux à la crème.

— Voyez, là-bas, comme c’est curieux cette bouée qui a l’air d’un bateau…

— Ze vois rien, fit l’Italien, qu’est-ce c’est ?

— Une bouée…

— Une bouée ?… Oh ! non, z’est un bateau…

— Un bateau ?… Croyez-vous ?… Mais… ah ! oui… c’est… un bateau… Ah ! ça, ça m’en bouche un coin, mais… alors, regardez comme c’est curieux… c’est… un bateau qui a l’air d’une bouée !

Pourvu que ce ne fût pas un périscope, qu’importait !

Dieu est bon, et Barbet, qui secrètement l’implorait comme aux temps pieux de son enfance, n’en vit paraître aucun. La seule chose qu’il découvrit fut, au bout d’une heure, la côte d’Angleterre. Et alors, malgré lui, il eut un éclat de rire.