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LE MAJOR PIPE ET SON PÈRE

personne, simplement parce qu’il souffre et qu’il est malheureux.

Le vétérinaire-chef, un homme trapu, très rouge, enluminé, tout drôle, montrant à Barbet une bordure d’œillets d’Inde devant un cheval fourbu, dit :

— Il est bien heureux… ça conforte son œil !

Et comme la bête s’effarait d’une caresse, il fit sur un ton doucement fâché :

— Pourquoi vous êtes pas gentil, puisque vous êtes confortable ?

Il passait des hommes vêtus de blouses immaculées, qui portaient des seaux de fer-blanc où se reflétait le soleil. Allées ratissées, pharmacie étincelante, et plus loin, auprès de stands où l’on était en train de peigner avec soin des bêtes souffrantes, James Pipe et Barbet entrèrent à la suite du vétérinaire, qui poussa une barrière de cottage, dans une vaste prairie, haute en herbe, fraîche et gaie, d’où l’on découvrait tout le pays, et la ville, et la mer, qui faisait une tache, bleue très douce jusqu’à l’horizon.

Comme dans tous les beaux paysages, il y avait une vue de ciel énorme ; c’était un grand rayonnement de lumière sur une nature heureuse et calme aux yeux ; on avait envie de s’asseoir et