La-dessus, Madame Grandgoujon entra, et Madame des Sablons, s’apaisant, reprit son face-à-main. Puis, elles se firent mille grâces et échangèrent des pensées qui sembleront banales aux philosophes, mais qui ne sont que l’expression de deux cerveaux de femmes, accoutumées à redire ce que partout elles entendent.
— Excusez, Madame, l’encombrement de cette pièce…
— Madame, je trouve votre intérieur délicieux.
— Nous ne voulons pas jeter les journaux de la guerre, mais je ne sais où les mettre.
— C’est pareil avec mon mari : il garde tout ce qu’il trouve, en y inscrivant la date.
— Madame, mon fils m’a dit quel accueil il avait reçu…
— Madame, votre fils paraît si bon !
— Ah ! Il n’était pas né pour notre horrible époque !
— Croyez-vous que nous en voyons ! Mon mari, Madame, m’a affirmé ce matin que la tzarine trahissait.
— La tzarine ! Elle qui est venue à Paris !
— Ces choses font mal, dit Madame des Sablons s’animant, quand on est idéaliste ! Car je ne peux m’empêcher d’être une idéaliste !
— Ah ! soupira Madame Grandgoujon, à quand la paix ?
— Hélas ! on ne peut la demander.
— Pourtant, avec ces menaces allemandes…
— Madame, il paraît que c’est du bluff.