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GRANDGOUJON

— L’fauve ne r’çoit pas.

— Il n’re… ?

Le sergent s’étrangla de colère. Puis il flanqua des coups dans la porte, qui se rouvrit ; mais le garde-mites remua sa gueule énorme :

— Bon ! Qu’ils entrent ! Et puis qu’ils fauchent tout !… La gabegie ? ça me va !… Le pillage ? ça colle !… J’m’en débarbouille… bonsoir !

Il fit trois pas dehors. Grandgoujon, navré, balbutia :

— Nous ne voulions pas vous importuner…

— Vous, qui vous demande l’heure ? hurla le sergent qui s’approcha du fauve et s’excusa sans doute.

Celui-ci devint rouge, puis, désignant Grandgoujon :

— Approche ta viande !

Ils entrèrent tous.

— Godillots, allez oust !

Le fauve en jeta une paire.

— Essaye, souffla Quinze-Grammes. Grandgoujon ôta ses chaussures, enfila une des autres :

— Un peu grand…

— T’as qu’à t’fourrer quatre chaussettes avec une botte de paille ! cria le monstre… Culotte : voilà !… Redingote servie chaud… Képi, cravate… t’a qu’à signer et à foutre ton camp !

Le sergent s’était éclipsé. Quinze-Grammes dit :

— Et si ça va pas ?…

— D’main on rhabille !… D’main il part pour le front !