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GRANDGOUJON

— Pourtant, il ne sort jamais sans me prévenir…

Et elle n’avait pas fini, la pauvre, de s’inventer des craintes, quand une clé tourna dans la serrure. C’était lui.

— Écoutez !… Il n’est pas seul !… Qui ramène-t-il ?

La porte s’ouvrit. Elle aperçut un monsieur long et maigre qu’elle ne connaissait pas, et son fils, dont le visage était épanoui. Ah ! elle se retint pour ne pas lui sauter au cou ! Tout de suite, elle aussi, fit la meilleure figure et sourit au monsieur avec une grimace avenante de vieille dame, chez qui l’habitude d’être sensible fige un peu gauchement les traits.

— Ma mère… dit Grandgoujon.

Il n’était jamais si bonhomme que quand il prononçait ce mot-là ; il prenait sa maman par le bras :

— Ma mère… qui est une mère en sucre.

Puis :

— Maman, je te présente Colomb, mon ancien camarade de la Faculté de Droit, que je viens de retrouver au-dessus, chez… ça, c’est drôle… je ne sais même pas leur nom…

Le monsieur maigre, sans répondre, s’inclina très bas devant Madame Grandgoujon ; puis il salua Madame Creveau et enfin, se redressant avec gravité, il répondit d’une voix chargée de respect :

— Madame, j’ai rencontré votre fils chez mes