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GRANDGOUJON

— Voilà ! s’écria Grandgoujon, mon ambition depuis trois ans !

— Eh bien ! moi, dit le mari, je lutte, je tiens, je fais tenir.

— Et moi je demande à être utilisé, affirma Grandgoujon.

— Je parle, dit le mari, partout je parle.

— Il va dans toutes les villes parler, appuya la jeune femme.

— Ah ! ça, c’est très beau ! répéta Grandgoujon. C’est ce qu’il me faudrait. C’est…

Le mari prit un air humble :

— Je fais ce que je peux, pour un pays que j’aime plus que tout !

— Bravo, Monsieur ! Car c’est un merveilleux pays ! dit Grandgoujon. On peut blaguer nos députés : je les ignore. Mais rappelez-vous comme on vivait dans ce pays, avant la guerre. Liberté et douceur de mœurs. Il ne faut pas raconter maintenant…

— C’est d’une jolie sensibilité ce que vous dites là, dit la jeune femme dont le visage s’animait. Nous avons toujours été la nation de l’idéal et de la petite fleur bleue !

Elle lui tendit la main : il la prit ; une main tiède, délicate : il en sentit, ce brave Grandgoujon, son cœur bondir. Et c’est à ce moment qu’avec chaleur elle lui conta son œuvre à elle aussi : elle avait, grâce à son mari, à côté de lui, avec l’aide de dons généreux, organisé une cantine à La Chapelle, une autre à Pantin, et elle aimait, elle aimait follement les soldats de France