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GRANDGOUJON

— On les aura ! cria-t-il.

— Bien sûr qu’on les aura ! répondit Grandgoujon.

— Et si on les a pas, fit le soldat, on les laissera !… Et tu parles d’un blair qu’ils f’ront !

Puis, sans musettes, il disparut, riant, rond comme une pomme, et tout à fait heureux, quoiqu’il retournât à la guerre, sans rien rapporter aux copains.

Grandgoujon ne retrouva pas la femme ; au surplus, il ne la chercha point. Il prit une voiture avec son mioche et rentra. L’enfant n’avait pas lâché le panier du cochon d’Inde. Alors, Grandgoujon commença par lui présenter le chat et l’oiseau sans derrière :

— Ma pauvre mère aimait son chat, vois-tu. C’est un chat tombé et qui s’appelle Guillaume, mais il est quand même intelligent. Ma mère avait une sonnette dans sa chambre, un cordon près de son lit. Un jour, le chat l’a tiré pour qu’on vienne : Monsieur avait besoin d’aller dans son plat !

L’enfant ne bronchait pas : aucune réaction. Alors, Grandgoujon le coucha. Pour cette première nuit, il l’installa dans ses propres draps, et il lui dit :

— Tu vas bien dormir ici. Dors avec ton cochon d’Inde et, surtout, comme disait le copain, ne t’en fais pas ! Tu peux me croire, je suis un homme de quarante ans.

Mais un long discours était inutile : l’enfant déjà dormait. Grandgoujon se le fit donc à soi--