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GRANDGOUJON

— Il va remonter à Adam et Eve ! dit Moquerard.

— Du tout. Je m’explique. La réalité moderne était là, et chacun s’est aperçu…

— Attention ! dit Moquerard.

— … qu’il était noyé… dans des rouages trop nombreux.

— Dans des… ? Oh ! « noyé dans des rouages ! » fit Moquerard.

— Vous me comprenez, dit Grandgoujon, tout rouge et soudain passionné. On a appliqué le principe idiot de l’égalité, et on ne s’est même pas servi de nous, les intellectuels !… D’ailleurs…

— D’ailleurs quoi ? Vite !… Nous sommes anxieux ! dit Moquerard.

Grandgoujon songeait à la girouette et au cabanon. Il reprit :

— Non… Pour ne pas gâter ce dîner, je ne veux pas en dire davantage…

— C’est tout ?… Oh ! mais alors, si c’est tout, très, très bien ! dit Moquerard. Très joli et fort bien dit !

Il se contorsionnait. Colomb riait. Madame des Sablons riait ; on entendait un gai murmure approbateur.

— Puisque tu te tais, dit Moquerard, je t’engage à boire : tu ne l’as pas volé !

— Remarquez, Madame… dit Grandgoujon…

— Ah ! il ne se tait pas ! cria Moquerard.

— Remarquez que je ne suis nullement anarchiste…

— Bois donc ! dit Colomb.