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GRANDGOUJON

— C’est cela.

— Nous suivons de près les bonnes familles. Vous êtes, n’est-ce pas, de la famille du colonel Grandgoujon, tué héroïquement à l’ennemi ?

— Du colonel ?… Non, non.

— Pas possible ?… Oh ! fit l’autre, le front pensif, il doit pourtant être votre parent… Enfin, Monsieur, la maison Moreuil manque de personnel, en cette terrible guerre.

— Ah ! s’indigna Grandgoujon, c’est elle qui nous tue tous !

— Seulement, dit avec gravité l’homme funéraire, nous devons aller jusqu’au bout.

Il s’inclina :

— Bref, nous aidons la maison Moreuil, et concevons comme elle un service : belle tenue qui n’empêche pas la tristesse ; mais la tristesse non plus n’exclut pas le décorum, et le chant d’abord ! Il en faut, Monsieur… Dans la troisième classe, vous aurez le chant en trois points, avec réponses par les enfants de chœur.

Il tira des cartons de sa serviette.

— Pour la décoration, si vous pouvez jeter un coup d’œil sur nos modèles ?… Merci, Monsieur… Voici le catafalque, trois écussons, douze candélabres. Puis, le tapis : Monsieur votre père eut un tapis. Le tapis est en plus depuis la séparation de l’Église et de l’État… Nous voudrions faire mieux : la loi nous en empêche.

— Jolie, la loi ! grogna Grandgoujon. Ah ! Monsieur, nous sommes des électeurs, c’est-à-dire des poires et des bouchons…