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GRANDGOUJON

— Des enfants ? En effet ! reprit Colomb illuminé.

Et il tira des papiers de son veston.

— Tout ça, des notes qui représentent des douzaines d’enfants… Mais on me fait signe, on commence ! Je penserai à vous !

— À lui.

— Soyez tranquille. Voici notre cher Punais… Les petits, silence ! Tournez la tête de mon côté !

Moquerard s’éclipsa. Colomb s’agita. Le chœur des enfants chanta.

Ce fut d’une note à la fois patriotique et religieuse ; la puérilité des voix fit de la Marseillaise un cantique. Et de vieilles dames hochaient la tête, tandis que des jeunes souriaient, murmurant : « Qu’ils sont mignons ! »

On applaudit longuement. Sur l’estrade, le colonel se leva pour serrer les mains de Colomb, et Monseigneur eut un geste bénisseur, qui montra sur son gant sa bague à l’assemblée.

Un officier serbe, appuyé sur deux béquilles, fit à ce moment une émouvante entrée : on s’écarta pour lui faire place. Colomb entassa ses enfants dans un coin de l’estrade. Des femmes curieuses se levaient pour mieux voir ; mais des hommes irrités criaient : « Assis ! On ne voit plus ! » Enfin, l’atmosphère était échauffée, électrique et propice à faire vibrer la parole de l’orateur. Mais avant de parler, Punais s’était glissé près de Grandgoujon et, fébrile, dans une porte, il lui avait soufflé :