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GRANDGOUJON

— Encore !

Traînant ses savates, avec cet air énigmatique qui semblait cacher du mépris ou un mauvais tour, Mariette annonça :

— M’sieur et Mame des Sablons.

Grandgoujon se dressa, rageur.

— Ils tombent bien !… Je ne suis pas présentable.

Puis :

— Après tout, je m’en fiche ! Faites entrer.

— Oh ! dit Madame Grandgoujon, j’ai cuit tes œufs dans le plat cassé…

— Ça leur fera les pieds ! dit-il. Faites entrer !

Et des yeux il fixait la porte.

Il y a certaines gens qui, pour être aimables, pénètrent chez les autres avec des sauts et ébrouements d’oiselles, remplaçant le frou-frou du plumage qui manque, par un pépiement dans lequel les mots s’envolent et s’emmêlent, vides et privés de sens. C’est ainsi que Monsieur et Madame Punais des Sablons s’introduisirent, nez à l’air, battant des ailes, Madame empressée, avec des éclats assortis à ses yeux brillants et à ses lèvres carmin, et Monsieur élégant, juvénile, dans une robe de chambre beige à brandebourgs noirs, d’où sortaient de petites mules en cuir de Russie.

— Chère Madame, mon mari rentre…

— Et ma femme affirme que nous ne vous dérangerons pas…

— Nous voulions tout de suite des nouvelles de votre fils.

— Mon ami ! Cher ami ! Vous en venez ?