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GRANDGOUJON

— Sauriez-vous, Messieurs, où est la Compagnie Z ?

Les marchands lui firent répéter, devinrent songeurs, puis parlèrent d’autre chose.

La Compagnie Z n’était pas non plus connue des soldats, à la gare où il descendit. Pour changer, on l’envoya à un commissaire militaire, qui, pour changer, l’expédia aux baraques du Génie, d’où il courut à la cabane d’un téléphoniste, et celui-ci dit enfin :

— La Compagnie Z ?… T’en fais pas. T’as pas à y aller toi-même.

— Pardon : j’ai l’ordre…

— Dans c’cas, t’as qu’à attendre ; et à midi, t’embarques dans un camion ton matériel.

— Mais j’ai un wagon…

— Alors, c’est différent. T’en fais pas ; assieds-toi ; ils viendront prendre ton truc.

— Mais j’ai aussi une girouette !

— Ah ! c’est pus pareil. Donc, tu laisses ton wagon, mais t’emportes ta girouette.

— Où ?

— T’en fais pas ! Douze kilomètres.

— Et là-bas ça barde-t-il ?

— Penses-tu ! C’est calme comme sur la place des Invalides !

De joie, Grandgoujon éclata de rire. Puis il ressortit, erra dans le village boueux et lamentable, aperçut un territorial qui, dans une marmite graisseuse, préparait de la nourriture, et s’en fit un ami, en remarquant avec sa brave figure ronde :