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GRANDGOUJON

— Hier ?… grogna Grandgoujon. Encore ? Il y couche !

Il se leva. Les sourcils froncés, il fit quelques pas dans la chambre. Sa mère essaya des caresses : il y fut insensible. Et voici que, dans cette maison, son esprit de nouveau se donnait tout à cette jeune femme, oubliant Nancy, les obus et le reste.

Mais il n’avait pas grand loisir pour ruminer des idées d’adultère et de jalousie vengeresse, parmi lesquelles, au surplus, il errait maladroitement. L’heure pressait. Il mangea, but, se changea, fit cette fois un paquet de provisions et un rouleau de deux couvertures, but encore, et enfin il allait repartir en campagne, lorsqu’on sonna et Mariette introduisit Quinze-Grammes.

— Ah ! fit ce dernier, je v’nais voir si t’étais claqué. J’portais d’la copie à ma sœur pour la signorita du d’ssus.

— À propos, dit Grandgoujon, Moquerard l’a-t-il revue ?

— Tu parles ! Ils sont copains comme cochons : et elle y a joué la Marche Turque.

— La Marche

— Pis il est emballé !… Mais d’où t’arrives, frère mironton ?

— De Nancy.

— Qu’est-ce t’as foutu dans c’ patelin-là ?

— J’ai été bombardé.

— C’est ça qu’ t’as maigri…

— Oui, je boutonne ma capote… Dis-moi… Moquerard, chez elle, a-t-il rencontré Colomb ?