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GRANDGOUJON

des ingénieurs raisonnâbles et de ce qu’ils fabriquent. Or, vous, ici, Madame, n’avez rien qui soit fabriqué par un ingénieur. Je salue donc votre goût !

Il furetait, touchait, et tandis que Madame des Sablons riant, lui montrait ce qu’il ne voyait pas, Grandgoujon, mélancolique, fit tout à coup :

— Je… je vais être forcé de vous quitter !… Tu pars aussi ?

Il avait mis sur ce dernier mot une si étrange intonation, que Moquerard répliqua :

— Moi ? Je suis très bien ici !… Où vas-tu ?

— Dîner, parbleu ! reprit Grandgoujon, essoufflé et mauvais. Il faut que je couche à la caserne !… Et je n’ai même pas pu aller chez Creveau !

— Qui ? L’avocat ? Tu connais ce crétin ?

— C’est mon patron.

— Non ? Ah ! Marie, ma chère, quelles fréquentations !

— Bah ! S’il peut me faire utiliser…

— Utiliser ?

— Il est intime avec le ministre.

— Moi aussi.

— Lequel ?

— Le prochain… ce qui vaut mieux, puisque l’actuel va tomber.

— Vrai ?

— Ils tombent tous.

— Oui, tu blagues… dit Grandgoujon. Mais à ma place, qu’est-ce que tu ferais ?

— Au sujet de ?