Page:Benjamin - Antoine déchaîné, 1923.djvu/30

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
32
ANTOINE DÉCHAÎNÉ

— Vous avez pris ce qui a le moins de caractère ! Tenez, faites demi-tour… À la bonne heure !

— Ceci ?

— Oui, mon petit vieux.

— On se croirait à Bondy !

— Avec l’enfilade de la rue et la perspective des Arènes ?

— Je n’avais pas vu les Arènes.

— Vous vieillissez !

— Un peu,… et ça m’est égal…

— Je t’en fiche ! Je te donnerais mes vingt-huit printemps…

— Que je te les rendrais !

— Vraiment ?

— Car avec vos vingt-huit printemps, je ne serais pas sûr d’arriver à mes cinquante-sept. Ah ! mais ! Tandis que moi, maintenant, qui ait trente ans de moins à m’offrir, c’est entendu… je les ai vécus ces trente ans-là !

Il fait des yeux ronds, et de l’index souligne sentencieusement ce qu’il dit :