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ANTOINE DÉCHAÎNÉ

travaille comme un cheval, je me crève, j’ai le droit de manger !

Alors, on lui met de tout ce qu’on trouve dans des assiettes et on lui tend des verres pleins.

Il dit : « Posez tout ça là ! »

Puis il commence à avaler, nerveusement, furieusement. Il mange des olives et leurs noyaux, du jambon sans couper le gras, des sardines avec la peau et les arêtes. Il mange des cerises, une poire et ensuite du veau froid, et il ne cesse de pester, seul contre son arbre :

— Écœurant !… Des pellicules à cinquante sous le mètre ; c’est cher pour de l’amour ! Tout ça parce que sa donzelle n’était pas avec lui !…

Il crie :

— Du café maintenant ! Je veux du café !… Et je veux le régisseur aussi !

Le régisseur se présente en hâte, tenant un litre de liquide noir.

— Voici, patron !

— Mon vieux, ça ne peut pas continuer !