Page:Benjamin - Antoine déchaîné, 1923.djvu/150

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
152
ANTOINE DÉCHAÎNÉ

— Vous n’avez même pas été foutus de préparer le déjeuner ?

Ce n’est pas faute d’y avoir songé. Ils n’ont pas eu d’autre pensée depuis qu’on les a chassés de la cour, car ils sont venus retrouver le panier aux victuailles et ils se sont demandé deux heures durant : « Faut-il l’ouvrir ? Faut-il le laisser ? Si on l’ouvre… il fumera ! Si on le laisse… »

Ils l’ont laissé : il fume tout de même. C’est un prétexte ; il est d’une nature volcanique : il faut toujours s’attendre à une éruption. Celle-ci est grave.

Il s’assied au pied d’un arbre :

— Je veux tout de suite manger et boire !

Alors, ils sont dix à la fois à ouvrir le panier et à se ruer vers lui avec serviette, couverts, nourriture, boisson.

— Prenez, patron ! Si, si, prenez !… Patron, préférez-vous du saucisson ou des sardines ?

— Je m’en fous, monsieur, je veux manger ! Je