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ANTOINE DÉCHAÎNÉ

vieille. Était-elle un château protecteur des passants ? Fut-elle un repaire guettant les voyageurs ? Du temps que la vie sociale était plus âpre, à coup sûr, ces pierres abritèrent d’autres hommes que des paysans, et l’on y vit des scènes encore plus noires que la mort du pitoyable Frédéri.

Tout de suite, on évoque son suicide devant ce grand roc à pic. Car d’un côté la ferme rejoint la route par un chemin d’une pente douce, — et c’est le côté qui regarde vers Arles, — mais de l’autre, face à Fontvieille et aux Alpilles, la chute est rude et dramatique ; à cette vue le cœur se serre ; et tout près des peupliers tremblent.

Antoine étudie, place ses scènes ; et le fantôme de Daudt l’assiste, car on voit son moulin de la ferme du Castelet, comme lui voyait la ferme en écrivant ses lettres. Tout est prêt. Il ne manque que la troupe.

Une heure, qu’il est là à se ronger ! Dire qu’autrefois, quand il avait des acteurs, il suait sang et eau pour avoir des décors ! Aujourd’hui, la