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ANTOINE DÉCHAÎNÉ

— Tant mieux ! Pour une fois, ça aura l’air vivant ! À vous, monsieur Mitifio… Dépêchons !… Prenez-la par les bras, et serrez-la jusqu’au sang !

— Non, tout de même ! crie l’Arlésienne.

— Quoi, non ?

— Il va me casser !

— S’il vous casse, on vous paiera ! Vous, prenez-la et poussez ! Poussez ferme dans la porte ! Non ! Ce n’est pas ça du tout !

— Ah ! geint une femme du peuple, la pauvre actrice, elle gagne pas ses sous à rien faire.

Le Sociétaire se penche sur elle avec une paternelle noblesse :

— Vous avez la preuve que le cinéma n’est pas un métier de fainéants.

— Je ne sais si je pourrai m’y habituer, soupire la cantatrice.

Mais Antoine, pour indiquer la scène à Mitifio, se met cette fois à la jouer lui-même. Il marche vers l’Arlésienne, les épaules rondes, ramassé sur soi ; le visage exprime la haine ; les poings sont ser-