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qui ont tous deux l’esprit de patrie. Les traits que vous dénoncez n’ont jamais marqué que des sous-variétés. En vérité, c’est vous, mon fils, qui me déconcertez, avec votre romantisme. Deux espèces morales ! Vous ne parleriez pas autrement si vous opposiez aux Européens les Papous qui font cuire leurs enfants dans des marmites ou les Polynésiens qui adorent l’âme du monde dans le corps des lézards ! Il faudrait cependant, si nous sommes des philosophes, garder quelque sang-froid et ne point nous mettre à prendre pour des racines psychologiques de simples désinences, parce qu’elles touchent particulièrement nos passions et nos intérêts[1].

  1. Snyders abuse de ce que son candide interlocuteur ne fait porter la différence des deux groupes de belligérants que sur des conceptions politiques. Un témoin nous raconte (Th. Morse, Un Anglais dans l’armée russe, p. 106) qu’en novembre 1914, quand les Allemands furent contraints d’évacuer leurs conquêtes en Pologne, un jeune et élégant lieutenant prussien crut devoir, avant de partir et pour marquer son dépit, étrangler le couple de serins de la petite fille de la maison où il logeait, laquelle en fut malade. Le peuple dont un membre supérieur est capable de tels actes semble bien être d’une autre « espèce morale » que les Français ou les Anglais.