Page:Belzoni - Voyages en Égypte et en Nubie, 1821, tome 2.djvu/260

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
252
voyages en égypte,


passent à leurs yeux pour de profonds secrets, dont la possession donne une haute réputation de sagesse et de science. La plupart des villages ont de ces grands docteurs ; aussi quand un voyageur a la bonté de leur enseigner quelque chose d’utile, ils s’imaginent qu’il ne dit pas son secret, étant habitués à la conduite mystérieuse de leurs jongleurs.

Pour revenir à mon ophtalmie, je ne pus m’en débarrasser aisément. Semblables aux consolateurs de Job, les femmes me dirent que dans vingt jours peut-être je me porterais mieux ; sinon, cela irait à quarante, et elles finirent par crier malache (ce n’est rien !). Au lieu de me porter mieux au bout de vingt jours je devins entièrement aveugle. Je ne saurais décrire le chagrin que j’éprouvai ; je crus avoir perdu la vue pour jamais ; cependant les femmes criaient toujours, malache. Le dernier terme de la maladie était réellement terrible ; les paupières perdirent tout leur ressort ; je ne pouvais plus les lever. Les femmes firent bouillir de l’ail dans de l’eau pour baigner mes yeux. Je ne sentis pas tout de suite l’effet de leur remède, cependant il paraît m’avoir fait du bien ; les paupières reprirent un peu de force, et au bout de quarante jours je pus voir un peu.

Vers ce temps M. Belzoni ayant embarqué le