Page:Beltjens - Nox, 1881.djvu/11

Cette page a été validée par deux contributeurs.


De tous mes vœux déçus c’est le seul qui me reste,
C’est le seul qui sera par le sort écouté ;
Ô Sphinx, j’ai deviné ton énigme funeste,
Et je sais ton secret, triste Nécessité !

Je ne crois plus à rien qu’à vous, sombres fantômes,
Fatalité, Hasard, au sceptre souverain ;
C’est vous seuls qui réglez la danse des atomes
Sur le rythme éternel de vos lyres d’airain.

Rien n’est vrai, rien n’est faux ; sous ta roue, ô Fortune,
Le lâche et le martyr sont broyés tour à tour ;
Dans la mer des humains tu fais comme la lune,
Le flux et le reflux, sans haine et sans amour !

La Force est au plus fort, la Justice est un leurre ;
Seul, le glaive décide. À quoi bon s’indigner ?
Le lion est le maître, et la brebis qui pleure
N’a qu’à baisser la tête et qu’à se résigner.

Pénélope sans yeux, la matière ignorante
Fait et défait le monde à son obscur métier ;
Crime impuni, Vertu dans les cachots souffrante,
Pêle-mêle la Mort vous pile en son mortier !