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Les modernes Molochs, debout dans les usines,
Où la faim nuit et jour dans ses bras les étreint,
Au milieu des vapeurs de leurs sombres cuisines,
Font grincer lourdement leurs mâchoires d’airain.

Et les voix s’élevant des bazars, des tavernes,
Des marchés, des trottoirs, des gares, des perrons,
Près des temples déserts les clameurs des casernes,
Et des bagnes hideux les cris et les jurons ;

Et pesants chariots et carrosses de fête,
Attelages piaffant au milieu des bravos,
Et régiments, drapeaux au vent, musique en tête,
Fourmillantes rumeurs d’hommes et de chevaux,

Parfois dans une brusque et rapide rafale,
Tous ces bruits vont ensemble en un seul s’entasser,
Puis s’écroulent pareils à la voix triomphale
Qui précède te char d’un roi qui va passer.

Et la brise des mers emportant dans l’espace,
Le concert des fourneaux et l’hymne des clairons,
Demande à la fumée effroyable qui passe :
Qu’est-ce qu’ils font là-bas, tous ces noirs forgerons ?