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Un tout petit Zéphyr, sans se faire prier.
Accourt auprès de lui, frais, joufflu comme un page,
De sa partition prêt à tourner la page.
Lui regarde l’orchestre, et d’un geste nerveux,
Après avoir passé la main dans ses cheveux,
Il donne le signal.

L’alouette commence :
Sa voix d’un joyeux trille emplit le ciel immense :
Elle monte, elle monte, en un chant vif et clair
Monte encor, puis soudain descend comme un éclair.
Le maître dit : C’est bien. — À l’instant l’auditoire
De la jeune soliste applaudit la victoire,
Laissant dans les blés verts la caille et la perdrix
Du duo concertant se disputer le prix.
Et maintenant à vous, faites vos chansonnettes,
Chardonnerets, bouvreuils, sveltes bergeronnettes,
Rouges-gorges, verdiers, mésanges, sansonnets,
Fauvettes qui mettez de travers vos bonnets,
Roitelets pétulants, sémillantes linottes,
Et toi, charmant moqueur, effroi des croque-notes ;
Pinsons dans le jardin, martinets sur la tour,
Fredonnez, babillez, et laissez vos ramages,
Sinon les surpasser, égaler vos plumages !
Et pas tous à la fois ! En son petit solo
Que chacun se conforme au conseil de Boileau :
Hâtez-vous lentement ; redoutez la censure,
Et surtout, et partout observez la mesure !

La science du maître a d’ailleurs tout prévu.
Si tel jeune premier de bon goût dépourvu,