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» C’est par moi, l’Apostat fétide, l’être immonde,
» Justement par le Ciel rejeté dans l’Enfer,
» Comme un rameau pourri d’un arbre qu’on émonde !

» Ô Jésus, ce n’est rien tout ce que j’ai souffert ;
» Et que mon châtiment encor s’appesantisse,
» Que Satan me reprenne entre ses dents de fer ;

» L’éternité durant, que nul ne compatisse
» À mon irréparable et suprême abandon,…
» — Je reconnais en tout l’infaillible Justice,

» Mais toi, qui prends pitié du plus humble chardon.
» En voyant mes remords, que ta bonté m’accorde,
» Avant de t’en aller, un seul mot de pardon !

» Un seul, ô Dieu d’amour et de miséricorde ! »
— Alors, Jésus ayant écouté le maudit,
J’aperçus qu’il tira de sa robe une corde,

Et, penché sur l’abîme, à Judas il tendit,
Par une chaîne d’or du haut des cieux venue,
Le nœud avec lequel le traître se pendit.

Judas saisit la corde, et, l’ayant reconnue,
Vers la haute paroi qu’il eût voulu briser,
Bondit comme un éclair qui déchire la nue.

Assisté du Sauveur, dès qu’il vint se poser
Sur l’âpre escarpement de la morne ravine,
Jésus, ouvrant les bras, lui rendit son baiser.

— Oh ! qui peindrait jamais cette scène divine ?
Pendant que, sous les yeux du céleste Martyr,
L’Apôtre se pâmait, mêlant sur sa poitrine,