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Parfois, dans un détour de la sombre Dité,
Un fantôme passait, en flamboyant costume,
Qui nous montrait le poing, d’un visage irrité.

Pendant que j’avançais dans ces lieux d’amertume,
Soutenu par la main du céleste étranger,
Le long des lacs bouillants de flamme et de bitume,

D’un air compatissant il paraissait songer,
Et chacun de ses pas dans l’obscur labyrinthe
Laissait comme une odeur de rose et d’oranger.

Quand parfois j’hésitais, arrêté par la crainte,
Aux coins où surgissaient de plus hideux essaims,
Je sentais de ses doigts une plus molle étreinte.

J’ignorais quels étaient avec moi ses desseins ;
Mais lorsqu’à nos regards parut dans l’ombre immense
Le cercle redoutable où sont les assassins,

Je vis son beau visage où brillait la clémence,
Pâlir, comme quelqu’un qui s’en vient dans les champs
Voir comment un orage a détruit sa semence.

Lui-même eut des frissons à l’aspect des méchants,
Qui, d’un lambeau de pourpre et d’un peu d’or avides,
Dans le meurtre ont vautré leurs féroces penchants.

Dans un fleuve profond baignaient, nus et livides,
Du sang jusqu’à leur cou, ces dresseurs d’échafauds
Qui ne pouvaient laisser dormir les tombes vides ;

Qui du spectre macabre ont aiguisé la faulx,
Pour avoir des palais remplis de courtisanes,
Et pour se pavaner sur des chars triomphants,